Fatiha Benabou: «Lorsqu’une constitution est rejetée par le peuple, elle devient caduque»
La constitutionnaliste Fatiha Benabou, livre son analyse sur les résultats du référendum sur le projet de révision de la constitution. Elle appelle à dépasser la question de la «légalité» du texte, adopté par une minorité des électeurs.
Dans ce cas, a-t-elle soutenu dans un entretien accordé au quotidien El Watan, le principe de la « légitimité » ne doit pas être négligé. « Il est même plus important », a-t-elle expliqué. « Il faut noter qu’il y a une différence entre la légitimité et la légalité. C’est important. Sur le plan de la légalité, il n’y a aucun texte qui précise le seuil de la participation qui doit être atteint pour valider ce projet. C’est pourquoi, il faut passer à une seconde grille d’analyse, qui est d’ordre politique. Une constitution, qu’on le veuille ou non, n’est pas l’acte du Président. Ce dernier n’est que l’initiateur. Elle est l’acte du peuple, selon l’article 7 de la Constitution », a-t-elle souligné.
Selon elle, la « constitution qui n’a pas l’accord du peuple est illégitime ». « Quand une constitution n’a pas l’accord de peuple expressément par le biais de «NON» ou implicitement à travers l’abstention, elle est illégitime. Car elle doit avoir le consentement de peuple, c’est-à-dire du corps électoral », a-t-elle indiqué.
Ce faisant, elle appelle le chef de l’Etat, Abdelmadjid Tebboune, « à faire une lecture politique des résultats du référendum, parce qu’il est garant de la constitution. Il doit prendre en considération le question de le légitimité ». « La constitution doit unifier le peuple et ne pas le diviser. Or, ce projet de révision a énormément divisé (…) lorsque une constitution est rejetée par le peuple, elle devient caduque », a-t-elle ajouté.
L’artifice juridique permettant au président de faire une telle lecture, a-t-elle précisé, existe. Il est contenu dans l’article 208 de la Constitution.
Poursuivant, Fatiha Benabou a rappelé qu’il n’y a aucun risque de nous retrouver sans constitution dans le cas où ce projet est abandonné. « Il y a toujours celle de 1996 qui a été amendée en 2016 par l’ancien président », a-t-elle insisté.
Boualem Rabah