Origine artificielle du virus Covid-19 : révélation fracassante ou vulgaire théorie du complot ? (vidéo)
Une nouvelle théorie sur l’origine artificielle supposée du Covid-19 circule sur les réseaux sociaux sous forme de vidéo virale. On y affirme que le virus responsable de la pandémie mondiale aurait été « inventé en laboratoire» et «breveté» depuis 2004, mettant en cause l’Institut Pasteur français.
Dans une vidéo d’une vingtaine de minutes vue plusieurs centaines de milliers de fois en très peu de temps sur les réseaux sociaux, son auteur suggère que les pouvoirs publics (français ndlr) mentent à propos de l’épidémie de Covid-19.
Le virus aurait été « inventé » et «breveté» et la pandémie ne serait rien d’autre qu’une «attaque biochimique», «créée par les Français et l’Institut Pasteur».
Un brevet portant le numéro EP 1694829-B1 est régulièrement brandi par le vidéaste qui en lit certains passages choisis qui prouveraient, selon lui, que le coronavirus a été créé en laboratoire.
Le fait que le brevet date de 2004, plutôt que de le faire réfléchir, constituerait une preuve supplémentaire du complot, selon lui.
Ainsi, pour l’auteur de la vidéo qui affirme avoir enquêté d’arrache-pied avec cinq autres personnes qui auraient requis l’anonymat, la pandémie qui ébranle le monde en ce moment serait le résultat d’une vaste manipulation à but mercantile dont devrait bénéficier l’Institut Pasteur français !
Un document authentique mais une théorie fumeuse
Le brevet en question sur la base duquel est échafaudée toute la théorie existe réellement, et il est accessible à tout un chacun. C’est un brevet de l’Institut Pasteur de 2004, qui porte sur le développement d’un vaccin contre le SRAS, qui appartient aussi de la famille des coronavirus.
«Le brevet déposé concernait bien le SRAS-CoV-1 (responsable de la maladie dite SRAS en 2002-2003), qui est très différent du SRAS-CoV-2 (responsable de la maladie dite COVID-19 en 2019-2020)», a expliqué l’Institut Pasteur sur son site web en réponse à ces graves accusations.
«Le brevet de 2004 décrit la découverte du virus puis l’invention d’une stratégie vaccinale contre ce virus, et NON l’invention du virus lui-même», précise l’Institut, démontant ainsi tout l’argumentaire du vidéaste.
Il n’est pas superflu de préciser que le terme «coronavirus» ne désigne pas seulement le Covid-19, mais toute une famille de virus connue depuis une soixantaine d’années.
«Les coronavirus forment une famille comptant un grand nombre de virus qui peuvent provoquer des maladies très diverses chez l’homme, allant du rhume banal au SRAS, et qui causent également un certain nombre de maladies chez l’animal», indique l’OMS à ce sujet.
Aussi apparaît-il que le brevet brandi comme la preuve irréfutable d’un complot n’a aucun lien avec la pandémie actuelle, mais concerne un vaccin contre le SRAS, une autre épidémie causée par un autre coronavirus.
Les conspirationnistes ne savent plus à quels coupables se vouer
En fait, depuis l’apparition de l’épidémie du Covid-19 en Chine, les théories de ce genre ont fait flores. Comme toutes les théories du complot qui se respectent, elles ont en commun de se construire autour d’éléments d’information qui peuvent en effet susciter parfois des interrogations. En outre il est généralement impossible de prouver l’existence du complot pas plus que son absence, même quand le scénario est des plus farfelus.
Ainsi, on a tour à tour accusé certaines puissances et organismes, à commencer par un laboratoire chinois de Wuhan monté avec le concours du savoir-faire français et inauguré en 2017. Bien entendu, l’élément déclencheur est le fait que l’épidémie soit partie de la même ville chinoise.
De même on a pointé du doigt des laboratoires secrets de l’armée américaine alors qu’aux Etats-Unis la thèse du complot juif est largement relayée dans les milieux de l’extrême-droite raciste et xénophobe…
En tout état de cause, des scientifiques à la pointe de la recherche dans ce domaine, notamment ceux du Scripps Institute, mettent fin à la thèse d’un virus pandémique fabriqué en laboratoire. Leur analyse des données de séquençage génomique du SARS-CoV-2 et de virus apparentés n’identifie aucune preuve pouvant suggérer un virus artificiel et confirme, au contraire, son origine naturelle.
Leurs conclusions, présentées dans la revue Nature Medicine relèguent au rang de rumeur infondée la thèse des origines artificielles supposées du virus et permettent de se rapprocher de l’identification des origines possibles du nouveau coronavirus.
M.A. Boumendil