Sanctions contre l’Iran: quand les Etats-Unis se substituent à l’ONU
Sous la férule d’un Donald Trump obnubilé par sa réélection, les Etats-Unis ne se gênent plus à parler au nom de l’ONU. Ils ont, en effet, unilatéralement décidé, la nuit dernière, le retour aux sanctions des Nations unies contre l’Iran et ont promis de punir ceux qui les violent. La réaction des grandes puissances, notamment la Russie et la Chine, ne s’est pas fait attendre.
Le ministère russe des Affaires étrangères a dénoncé dimanche matin dans un communiqué une initiative “illégitime” qui ne pouvait avoir “par définition de conséquences légales internationales pour les autres pays”. Les ministres des Affaires étrangères de la France, de l’Allemagne et du Royaume Uni ont de même souligné dans un communiqué que cette initiative américaine était “sans effet en droit”.
Ce geste de défi au reste du monde, puisque les Etats-Unis sont en fait l’un des seuls pays au monde à estimer que ces sanctions sont en vigueur, risque en effet d’accroître les tensions internationales.
“Aujourd’hui, les Etats-Unis saluent le retour de quasiment toutes les sanctions de l’ONU contre la République islamique d’Iran auparavant levées”, qui sont “à nouveau en vigueur” depuis samedi 20H00 (00H00 GMT dimanche), a déclaré le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo dans un communiqué.
Surtout, le gouvernement de Donald Trump menace clairement de mettre en place un système de sanctions dites secondaires pour punir tout pays ou entité qui violerait ces sanctions.
“Si des Etats membres de l’ONU ne remplissent pas leurs obligations pour appliquer ces sanctions, les Etats-Unis sont prês à utiliser leurs propres outils pour punir ces défaillances”, a prévenu Mike Pompeo. Il a promis que des “mesures” américaines seraient annoncées “dans les prochains jours” contre “ceux qui violent les sanctions de l’ONU”.
Washington, seul contre tous
A six semaines de briguer un second mandat, le président Trump pourrait dévoiler ces mesures lors de son discours de mardi à l’Assemblée générale de l’ONU.
Mais Washington est quasiment seul et contre tous: les autres grandes puissances, la Russie, la Chine, mais aussi les alliés européens des Américains, contestent cette affirmation, basée sur une manœuvre juridique, le “snapback”, qui n’est pas légitime.
“Toute décision ou action qui serait prise sur le fondement de cette procédure ou de son issue sont sans effet en droit”, avaient répondu par avance la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne dans une lettre commune adressée vendredi à la présidence du Conseil de sécurité, et publiée officiellement dimanche.
Moscou a également dénoncé cette affirmation unilatérale de Washington. “Nous avions tous clairement dit en août que cette manoeuvre était illégitime. Est-ce que Washington est sourd?”, a déclaré l’ambassadeur adjoint russe aux Nations Unies, Dmitri Polianski.
“Il est très douloureux de voir un grand pays s’humilier ainsi et s’opposer dans son délire obstiné aux autres membres du Conseil de Sécurité de l’ONU”, a-t-il tweeté.
Les Américains “se rendent compte eux-mêmes qu’il s’agit d’une déclaration mensongère”, a lancé de son côté le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif, appelant le monde à “parler d’une seule voix” face à Washington.
Comment en est-on arrivé à ce face-à-face spectaculaire entre la première puissance mondiale et le reste de la planète? Pour le comprendre, il faut revenir en arrière d’un mois.
Mi-août, le gouvernement Trump essuie un revers retentissant au Conseil de sécurité de l’ONU dans sa tentative de prolonger l’embargo sur les armes conventionnelles visant Téhéran, qui expire en octobre.
A.I./Agences