Victime collatérale de la guerre des prix du pétrole : l’Algérie dos au mur
Le marché de l’or noir est dans tous ses états, avec un baril qui tutoie les 30 dollars et qui pourrait chuter encore jusqu’à 20, selon certains analystes. La faute au coronavirus, bien sûr, mais pas seulement…
Le prix du baril de pétrole a violemment baissé hier, lundi, passant de 45 à 30 dollars. Dans un contexte d’épidémie mondiale qui ralentit l’activité économique, le Covid-19 en semble le coupable idéal. En réalité, le choc est surtout le résultat d’un affrontement entre l’Arabie saoudite et la Russie, avec les États-Unis en arrière-plan.
La semaine dernière, au cours d’un sommet de l’organisation Opep+, l’Arabie saoudite voulait un accord sur une baisse importante de la production pour maintenir les prix à un niveau acceptable. Les Russes y ont opposé un refus catégorique, malmenant ainsi l’alliance sur les niveaux de production de pétrole conclue avec l’Arabie saoudite en 2016.
Le royaume wahhabite digère mal ce qu’il considère comme un affront et réagit en en inondant le marché de sa production à bas prix, punissant ainsi le marché dans son ensemble.
La pétromonarchie du Golfe va-t-elle pour autant remporter l’épreuve de force face à la Russie ? La réponse semble couler de source puisque la compagnie d’Etat saoudienne, Saudi Aramco, reste bénéficiaire avec un baril à 30 dollars alors qu’en face, l’économie de la Russie dépend en grande partie de l’exportation des hydrocarbures et certains acteurs du secteur pétrolier russe ne pourront pas survivre longtemps si le cours du pétrole se maintient au niveau actuel ou, pire, s’il baisse davantage.
Pourtant des experts affirment qu’il n’est pas exclu que cette guerre des prix arrange Moscou, tout au moins à court terme. Les Etats-Unis sont l’acteur pétrolier de premier plan le plus exposé. Les producteurs américains de pétrole de schiste se sont lourdement endettés pour investir et sont, de fait, très fragiles.
Dans certains milieux avertis on pense même que la Russie a volontairement provoqué la réaction saoudienne pour faire payer à Donald Donald Trump sa tentative de faire capoter le projet de gazoduc Nord Stream 2 et les sanctions imposées à l’opérateur russe Rosneft pour ses affaires au Venezuela.
Ainsi, « Le Kremlin a clairement décidé de sacrifier l’Opep pour punir les États-Unis à un moment clef pour Donald Trump », qui compte sur une bonne santé de l’économie pour se faire réélire en novembre, affirme Alexander Dynkin, président de l’Institut de l’économie mondiale et des relations internationales, dans les colonnes du Los Angeles Times.
Mais, s’il est un pays lourdement impacté par les conséquences de cette guerre que se livrent Riyad et Moscou, c’est, sans conteste l’Algérie dont l’économie dépend des hydrocarbures et dont les réserves de change fondent comme neige au soleil.
La situation est d’autant plus inquiétante que le pays fait face à une situation inédite et qu’il s’engage sur la voie de profondes réformes nécessaires mais coûteuses. Mais, pourrait-on dire, à quelque chose malheur est bon. L’Algérie est dos au mur et devant l’impérative nécessité de diversifier l’économie, les dirigeants ne pourront plus se suffire de déclarations oiseuses et de vœux pieux.
M.A. Boumendil